Le retour de l’Iran, par Aymeric Chauprade, su www.realpolitik.tv; traduzione in calce di Giuseppe Germinario

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teheran-604x272 Le retour de l’Iran, par Aymeric Chauprade

Publié par Aymeric Chauprade le 18 novembre 2014 dans Articles

La chute de Sanaa n’a été que peu commentée ; pourtant, la prise de contrôle de la capitale yéménite par les rebelles chiites Houthis a d’importantes répercussions et doit surtout être interprétée dans un contexte plus large : la stratégie régionale de Téhéran dont l’influence s’étend désormais sur tout le Golfe.

De l’encerclement à l’offensive…

Ce résultat était pourtant loin d’être acquis : au cours de la décennie précédente, l’influence perse avait été réduite sous les coups de butoir de la diplomatie néo-conservatrice américaine et l’Iran, pratiquement encerclée. Présentes en 2001 en Afghanistan, les forces armées américaines envahissaient deux ans plus tard l’Irak. Au Liban, Assad retirait progressivement son armée sous la pression de Washington (2005), et l’État hébreu commençait de s’entendre avec l’Azerbaïdjan dans un échange dont seul Israël a le secret : devenant conseiller militaire de Baku comme il l’est de Singapour et de New-Dehli, Tel-Aviv lui vendait des armes, lui achetait son pétrole (un tiers de son approvisionnement) et infiltrait ses agents de sabotage via cette base avancée de sa lutte féroce et clandestine contre le programme nucléaire iranien. Enfin, dernier trait, au moment même où Israël recevait enfin de Washington le feu vert pour la fourniture de bombes anti-bunkers (les massive ordnance penetrators), Moscou refusait de livrer à Téhéran le système S-300 de défense sol-air de moyenne portée, indispensable bouclier pourtant de son programme nucléaire…et entamait des négociations avec Ryad pour l’exportation du S-400, le nec plus ultra de la défense sol-air.

Encerclée, l’Iran apparaissait exsangue, au point que les soulèvements post-électoraux de 2009 apparaissaient comme le prologue de la chute annoncée de Téhéran et le couronnement, tardif certes, de la stratégie des faucons néo-conservateurs de Georges Bush junior…

C’était sans compter sans la patience et l’endurance de Téhéran d’une part et les inévitables conséquences des erreurs stratégiques américaines de l’autre. Si les manifestations de 2009 ont surpris le régime des Mollahs, elles ne l’ont pas entamé : la répression fut suffisamment féroce pour être comprise…et le cœur du régime a pu vérifier sa cohésion et sa solidité. Mais le vrai combustible de l’offensive iranienne se trouve dans les errements de la Maison Blanche, du département d’État et du Pentagone, tous unis dans un même aveuglement qui a également déteint sur les meilleurs analystes de la C.I.A, instrumentalisée à des fins idéologiques comme l’a été le S.I.S britannique.

Les néo-conservateurs, tout à leur revanche stérile contre Saddam Hussein, ont effet liquidé le mauvais régime et dispersé les cadres du parti Baas laïc, transformant l’Irak en une Mecque du terrorisme; les apprenti-sorciers de Washington (Richard Perle, Dick Cheney, Donald Rumsfeld, notamment) consolidaient aveuglément un axe sunnite formé des régimes fondamentalistes musulmans : Qatar, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis. Cet axe sunnite, unis par le pétrole, les gros contrats d’armement et le terrorisme islamiste, cherchait partout à imposer sa volonté dans la région, notamment en Syrie. Une personne incarnait cette politique : le Prince Bandar bin Sultan, ancien ambassadeur saoudien à Washington et que l’on a souvent décrit comme un agent stipendié par la C.I.A. Sa réapparition au printemps dernier, après une brève éclipse de disgrâce, comme conseiller spécial du Roi Abdallah, en dit assez quant à l’influence américaine sur Ryad.

Le printemps arabe donnera bientôt à cet axe l’occasion d’accélérer leurs desseins géopolitiques. En 2009, la nouvelle administration américaine, tout aussi idéologique que la précédente, poursuivra son soutien aveugle à cet axe sunnite. La chute de la Libye de Khadafi en 2011 devait annoncer peu après celle du Caire de Moubarak en 2012 avec l’arrivée du Frère musulman Morsi.

Cette politique a provoqué le resserrement des liens entre Damas et Téhéran, tous deux soutenus par Moscou qui, après avoir perdu Le Caire, aux mains des Frères Musulmans, ne pouvait perdre ses deux derniers points d’appui régionaux. Préparant l’avenir, la Russie lançait un vaste programme de réarmement, dont le volet naval très ambitieux, prévoyait une flotte renforcée en Méditerranée et la consolidation de points d’appui : à Chypre (Limassol), à Alger (fourniture de deux Projet 636 armés de missiles de croisière Klub) et naturellement le port de Tartous (la Tortose des Templiers). La livraison de 72 missiles anti-navires Yakhont (P-800) à Damas, mais sous clé russe, l’agrandissement des quais flottants et la modernisation des ateliers de l’ancien port franc symbolisaient l’engagement solide de la Russie envers la Syrie. Dans le vocabulaire des amiraux russes, Tortose est ainsi passée en 2012 de base « d’appui technique » pour des navires en escale à celle de « point de déploiement » en 2013, permettant aux bâtiments de la Mer Noire de rejoindre Aden et l’Océan Indien en quatre jours à 20nd, soit moitié moins qu’au départ de Sébastopol…

Pendant ce temps, l’Iran poursuivait son programme nucléaire. Certes, de sporadiques explosions sur des sites sensibles, la paralysie des systèmes de contrôle des centrales par de mystérieux virus informatiques et l’assassinat ciblé d’ingénieurs en ralentissaient l’avancée. Mais, même fortement ralenti, Téhéran n’a jamais été sérieusement arrêté dans sa quête de la maîtrise du nucléaire civil et militaire.

Face à cet axe chiite renforcé, le camp sunnite se fissurait : le Qatar, grenouille pétrolière qui voulait devenir le bœuf régional, s’enhardissait au point de vouloir renverser les régimes saoudien et émirien, jugés trop occidentaux et décadents dans la foulée du Caire. Ce fut le pas de trop : Ryad et Abu Dhabi, dans un geste rare sommaient publiquement Doha en mars dernier de cesser toute ingérence sur leurs territoires, et pour bien être sûr d’être compris, entreprenaient des procès de « frères musulmans » à grand spectacle, aidaient le maréchal Abdel Fattah Saïd Hussein Khalil al-Sissi à renverser le président Morsi dans un coup d’État que Malaparte aurait certainement pris pour modèle s’il vivait encore….Washington, hésitant, laissait faire au Caire, tout en fournissant aides et armes aux rebelles « modérés » islamistes syriens depuis leur satellite régional, la Jordanie.

Le retour en force de l’Iran…

Résistance de l’axe chiite soutenu par les Russes, fissures de l’axe sunnite, hésitations américaines au Caire : telle était la situation à l’été 2014. La Blitzkrieg d’un nouvel acteur féroce, l’État islamique, fléau régional aux origines multiples, a radicalement rebattu les cartes du grand jeu régional en s’emparant progressivement de provinces entières irakiennes et surtout de ses gisements pétroliers.

Cette guerre-éclair islamiste, cruelle et médiatique, a soudainement ouvert les yeux de Washington. N’empruntant pas encore le chemin de Damas, l’Administration Obama a pris celui de Téhéran, ce qui vaut Canossa…Le marché conclu est simple : souplesse diplomatique dans les négociations sur le programme nucléaire iranien en échange d’un soutien militaire de Téhéran en Irak.

Marginalisé, sanctionné, l’Iran redevient courtisé par un de ces revirements soudains dont seule la diplomatie américaine a le secret, mais c’est oublier qu’entre-temps, Téhéran a avancé partout ses pions.

L’Iran a en effet consolidé son pouvoir sur quatre capitales : Damas où les pasdarans soutiennent le régime, à Beyrouth où le Hezbollah continue d’être l’arbitre discret de la scène politique, à Bagdad où les Chiites reprennent peu à peu les leviers du pouvoir et désormais Sanaa conquis par les Houthis, qui joueront le même rôle au Yémen que le parti de Dieu au Liban.

L’encerclement de l’Arabie

Ce vaste ensemble de manœuvres régionales vise deux objectifs : l’élimination de la dynastie des Saoud, jugés hérétiques, corrompus et décadents, et la destruction d’Israël.

Pour parachever son encerclement de l’Arabie, Téhéran s’attaque depuis quelque temps désormais à Bahreïn, majoritairement chiite. Cet objectif en vise d’ailleurs un autre par ricochet : la base de la Vème Flotte américaine. Pour une fois, le renseignement a été correctement analysé par l’U.S.Navy. Dans un rapport passé totalement inaperçu en juin 2013, « No plan B : U.S Strategic Access in the Middle East and the Question of Bahrain » publié par la prestigieuse Brookings Institution, l’auteur, Richard McDaniel un officier de l’U.S.Navy ayant stationné de nombreuses années dans le Golfe, expliquait en effet qu’il existait une possibilité non négligeable que le pouvoir des Al-Khalifa tombât un jour prochain sous la pression de la rue chiite, mettant ainsi en danger l’infrastructure la plus stratégique des États-Unis dans le Golfe, hub irremplaçable non seulement pour les opérations interarmées américaines mais également point focal des actions combinées avec les alliés britanniques. L’officier en appelait alors à « un plan B » (Oman en l’occurrence).

Combien de temps Bahreïn tiendra-t-il ? Sous contrôle saoudien, le sultanat n’en a pas moins passé commande cet été d’armes russes (des missiles anti-chars Kornet E) pour se concilier Moscou, un allié toujours précieux pour qui veut dialoguer avec Téhéran…

L’asphyxie de l’Arabie vise aussi la destruction de l’État hébreu, un des buts de guerre de Téhéran. Le double contrôle des détroits d’Ormuz et de Bal el-Mandeb est censé également déstabiliser le cas échéant l’économie israélienne.

Ainsi, sur tous les fronts, l’Iran sort vainqueur de l’affrontement dur avec le monde sunnite, en large partie grâce aux erreurs d’appréciation américaine. Avec la bombe nucléaire d’une part et le contrôle de deux détroits, Téhéran sera de facto en situation d’hégémonie. L’arsenal des pays du GCC ne servira en effet à rien car Washington en bloquera l’utilisation politiquement et technologiquement.

L’Arabie saoudite, au seuil d’une succession difficile, y survivra-t-elle ? Rien n’est moins sûr. Salman, le prince héritier et actuel ministre de la défense, est atteint de la maladie d’Alzheimer et prince Muqrin, n°2 dans la succession, respecté et sage, est cependant issu d’une Yéménite et non d’un clan royal saoud. La génération suivante est, quant à elle, pleine d’appétits, frustrée, à 55 ou 65 ans, de n’être toujours aux manettes du royaume…

L’observateur attentif aura remarqué un signe de la panique qui s’empare du régime et qui ne trompe pas : la transformation de la Garde Nationale (la SANG) en un armée (mai 2013) sous contrôle d’un ministre (le fils du Roi, Prince Mitaeb). La garde prétorienne remplace ainsi les légions jugées peu fiables. Prince Mitaeb a pris soin de doter la SANG d’armements modernes (avions d’armes F-15S, hélicoptères de transport et de combat, véhicules blindés et défense sol-air) venant de fournisseurs diversifiés (France, notamment) et surtout différents des forces armées traditionnelles (un cas répandu dans le Golfe pour éviter les embargos et préserver le secret).

Leçons pour la France

Face à ce tableau, quelle est la politique de la France ? Celle « du chien crevé au fil de l’eau ».

L’alignement français sur les positions américaines, nette depuis la réintégration française du commandement intégré de l’OTAN (mars 2009), a fait perdre à Paris toute marge de manœuvre pour jouer un rôle, pourtant taillé à sa mesure compte tenu de sa tradition diplomatique et de ses alliés régionaux. Apprentie sorcière en Libye (en février 2011), aveugle en Syrie (au point d’entraîner et d’armer les islamistes « modérés » et d’être à deux doigts d’envoyer des Rafale en août 2013 rééditer l’erreur libyenne), tournant le dos à l’Iran (en réclamant toujours plus de sanctions), elle a été prise de court par le revirement estival américain. Ce cocufiage de Paris par Washington ne serait que ridicule s’il n’emportait pas des conséquences tragiques sur le terrain et pour l’avenir.

Paris n’a ainsi plus une seule carte en mains : les routes de Moscou, de Téhéran et de Damas lui sont fermées et il n’est pas sûr que celles du palais saoudien d’Al Yamamah et de la Maison Blanche lui soient pour autant ouvertes. Délaissant sa tradition diplomatique, sourde aux réalités du terrain (l’armement de rebelles incontrôlables, le massacre des chrétiens, les effets terroristes sur son propre territoire), elle s’est fourvoyée dans cet Orient compliqué qu’elle connaissait pourtant si bien.

Pour jouer un rôle conforme à sa tradition et aux attentes de ses alliés régionaux, la France n’aura pas d’autre choix que de retrouver le chemin de Moscou, Téhéran et de Damas. Ce faisant, elle apportera un canal de discussions apprécié par les belligérants de la région et, même gageons-le, par la future Administration américaine. Participer à tout et n’être exclu de rien : tel est en effet le secret de la diplomatie.

Aymeric Chauprade
blog.realpolitik.tv

Il ritorno dell’Iran, di Aymeric Chauprade
Scritto da Aymeric Chauprade 18 novembre 2014 in Articoli
La caduta di Sanaa è stato poco commentata ; tuttavia, il controllo della capitale yemenita da parte dei ribelli sciiti Houthi comporta implicazioni importanti e deve, soprattutto, essere interpretato in un contesto più ampio: la strategia regionale di Teheran la cui influenza si estende ora su tutto il Golfo

 Dall’accerchiamento all’offensiva …

 

Questo risultato pareva tutt’altro che acquisito: durante il decennio precedente, l’influenza persiana si è ridotto sotto i colpi della diplomazia neoconservatrice americana e l’Iran praticamente circondato. Presenti nel 2001 in Afghanistan, le forze Usa hanno invaso due anni dopo l’Iraq. In Libano, Assad ritirava gradualmente il suo esercito sotto la pressione di Washington (2005), lo Stato ebraico stava cominciando a intendersi con l’Azerbaigian in uno scambio del quale solo Israele detiene il segreto: diventando consigliere militare di Baku come di Singapore e di Nuova Delhi, Tel Aviv le vendeva armi, le acquistava il suo petrolio (un terzo del proprio approvvigionamento),  infiltrava i suoi agenti di sabotaggio attraverso questa base avanzata della sua lotta feroce e clandestina contro il programma nucleare iraniano. Infine, ultimo aspetto, in un momento in cui Israele finalmente riceveva il via libera da Washington per la fornitura di bombe antibunker (massive ordnance penetrators), Mosca rifiutava di fornire a Teheran il sistema S-300 di difesa terra-aria di media portata, scudo indispensabile vitale per il suo programma nucleare … e avviava negoziati con Riyadh per l’esportazione di S-400, il massimo in termini di difesa aerea.
Circondato, Iran sembrava esangue, al punto che i disordini post-elettorali nel 2009 sono apparsi come il prologo della caduta annunciata di Teheran e il coronamento, certo tardivo, della strategia dei falchi neoconservatori di George Bush figlio …
Non si teneva conto del la pazienza e della capacità di resistenza di Teheran da una parte e delle conseguenze inevitabili degli errori strategici americani dell’altra. Se le proteste del 2009 hanno sorpreso il regime dei mullah, non lo hanno intaccato: la repressione è stata abbastanza forte per essere compresa … e il cuore del regime ha potuto testare la propria coesione e la propria solidità. Ma il vero carburante del offensiva iraniana alberga negli errori della Casa Bianca, del Dipartimento di Stato e del Pentagono, tutti uniti nella stessa cecità che ha offuscato i migliori analisti della CIA manipolati per fini ideologici come d’altronde il SIS britannico.
I neo-conservatori, con la loro vendetta sterile contro Saddam Hussein, hanno infatti liquidato il malvagio regime e disperso i quadri del partito Baath laico, trasformando l’Iraq in una mecca del terrorismo; gli apprendisti stregoni di Washington (Richard Perle, Dick Cheney, Donald Rumsfeld, in particolare) consolidavano ciecamente un asse sunnita composto dai regimi fondamentalisti musulmani: Qatar, Arabia Saudita, Emirati Arabi Uniti. Questo asse sunnita, unito dal petrolio, da giganteschi contratti di armamenti  e dal terrorismo islamista, cercavano di imporre ovunque la propria volontà nella regione, in particolare in Siria. Una persona incarnava questa politica: il principe Bandar bin Sultan, ex ambasciatore saudita a Washington, spesso descritto come un agente stipendiato dalla CIA. La sua ricomparsa nella scorsa primavera, dopo una breve eclissi di disgrazia, come consigliere speciale del re Abdallah, dice molto circa l’influenza americana su Riyadh.
La primavera araba fornirà presto a questo asse l’opportunità di accelerare i propri progetti geopolitici. Nel 2009, la nuova amministrazione americana, tanto ideologica quanto la precedente, continuerà a sostenere ciecamente questo asse sunnita. La caduta della Libia di Gheddafi nel 2011 doveva annunciare poco dopo quella di Mubarak al Cairo nel 2012 con l’arrivo dei Fratelli Musulmani di Morsi.
Questa politica ha portato al rafforzamento dei legami tra Damasco e Teheran, entrambi sostenuti da Mosca che, dopo aver perso Il Cairo, nelle mani dei Fratelli Musulmani, non poteva perdere i suoi ultimi due punti di appoggio regionali. Preparandosi per il futuro, la Russia lanciava un vasto programma di riarmo, compresa la componente navale molto ambiziosa, prevedeva una  flotta mediterranea rafforzata e il consolidamento di punti di supporto: Cipro (Limassol), Algeri (fornitura di due Progetti 636 armati di missili da crociera Klub) e naturalmente il porto di Tartus (la Tortosa dei Templari). La consegna di 72 missili anti-nave Yakhont (P-800) a Damasco, ma sotto controllo russo, l’estensione delle banchine galleggianti e l’ammodernamento dei laboratori dell’antico porto franco simboleggiavano il forte impegno della Russia verso la Siria . Nel vocabolario degli ammiragli russi, Tortosa è quindi passata da base di “appoggio tecnico” nel 2012 per le navi che approdano a quella di “punto di dispiegamento” nel 2013, consentendo ai bastimenti del Mar Nero di raggiungere Aden e l’Oceano Indiano in quattro giorni a 20nodi, ossia la metà che da Sebastopoli …
Nel frattempo, l’Iran proseguiva nel suo programma nucleare. Certo, esplosioni sporadiche su siti sensibili, la paralisi dei sistemi di controllo centralizzati dovuta a virus informatici misteriosi e l’assassinio mirato di ingegneri hanno rallentato i progressi. . Ma, anche se fortemente rallentato, Teheran non è mai seriamente stata fermata nella sua ricerca per il controllo del nucleare civile e militare.

Di fronte a questo asse sciita rafforzato, il campo sunnita presentava delle crepe: il Qatar, la rana petrolifera  che voleva diventare il bue regionale, si imbaldanziva al punto di voler rovesciare i regimi saudita e degli Emirati Arabi Uniti, ritenuti troppo occidentali e decadenti, sulla scia del Cairo. Era il passo di troppo: Riyadh e Abu Dhabi, in un gesto insolito convocava pubblicamente  Doha a marzo per intimargli di smettere di interferire nei propri territori e per essere sicuri di essere ben compresi, hanno inscenato processi ai “fratelli musulmani” con grande risalto, aiutavano il maresciallo Abdel Fattah Hussein Khalil al-Sisi a rovesciare il presidente Morsi con un colpo di stato che Malaparte avrebbe sicuramente preso a modello  se fosse ancora vivo … .Washington, con qualche esitazione, lascia fare al Cairo, fornendo nel contempo sostegno e armi ai “moderati” ribelli siriani islamici per il tramite del loro satellite regionale, la Giordania.
Il ritorno in forze  dell’Iran …
Resistenza dell’asse sciita sostenuto dai russi, le crepe nell’asse sunnita, esitazioni americane verso il Cairo: tale era la situazione nell’estate del 2014. La Blitzkrieg di un nuovo feroce attore, lo Stato islamico, flagello regionale dalle origini multiple, ha radicalmente ribaltato le carte del grande gioco regionale impadronendosi progressivamente di  intere province irachene e soprattutto dei suoi giacimenti di petrolio.

Questa chiarificatrice guerra islamista, crudele e mediatica, ha improvvisamente aperto gli occhi di Washington. Non riuscendo ancora a prendere la via di Damasco, l’amministrazione Obama ha intrapreso quella di Teheran, che equivale a Canossa … L’affare concluso è semplice: la flessibilità diplomatica nei negoziati sul programma nucleare iraniano in cambio di sostegno militare di Teheran in Iraq.
Emarginato, sanzionato, l’Iran torna ad essere corteggiato con uno di quei capovolgimenti improvvisi, di cui solo la diplomazia degli Stati Uniti detiene il segreto; ma si dimentica che, nel frattempo, Teheran ha avanzato le proprie pedine in giro .
L’Iran ha infatti consolidato il proprio potere su quattro capitali: a Damasco, dove i pasdaran sostengono il regime; a Beirut, dove Hezbollah continua ad essere arbitro discreto della scena politica; a Baghdad, dove gli sciiti gradualmente riprendono le leve del potere e ora Sanaa conquistate dagli Houthi, che giocheranno lo stesso ruolo in Yemen del partito di Dio in Libano.
L’accerchiamento dell’Arabia
Questo vasto insieme di manovre regionali mira a due obiettivi : l’eliminazione della dinastia dei Saud, considerata eretica, corrotta e decadente, e la distruzione di Israele
Per completare il suo accerchiamento dell’Arabia, l’Iran si dedica da qualche tempo al Bahrain, a maggioranza sciita. Questo obiettivo ne comporta un altro a sua volta: la base della Quinta Flotta americana. Per una volta, l’informazione è stata correttamente analizzata dalla US Navy. In un rapporto passato del tutto inosservato a giugno 2013, “ No plan B : U.S Strategic Access in the Middle East and the Question of Bahrain “, pubblicato dalla prestigiosa Brookings Institution, l’autore, Richard McDaniel, un ufficiale della Marina degli Stati Uniti di stanza da molti anni nel Golfo, ha spiegato che vi era effettivamente una possibilità non trascurabile che il potere di Al-Khalifa potesse cadere in un giorno prossimo sotto la pressione della strada sciita, mettendo così in pericolo l’infrastruttura più strategica degli Uniti Uniti nel Golfo; un hub insostituibile non solo per le operazioni congiunte americane, ma anche il punto focale delle azioni combinate con gli alleati britannici. L’ufficiale richiamava poi ad un “Piano B” (all’occorrenza l’Oman).
Per  quanto tempo resisterà il Bahrein? Sotto controllo saudita, il sultanato si è premurato di ordinare questa estate armi russe (missili anticarro Kornet E) per conciliarsi con Mosca, un alleato prezioso per chi vuole il dialogo con Teheran …

L’asfissia dell’Arabia mira anche alla distruzione dello Stato ebraico, uno degli obiettivi di guerra di Teheran. Il doppio controllo dello Stretto di Hormuz e di Bal el-Mandeb porterebbe a  destabilizzare, situazione clamorosa, l’economia israeliana.
Così, su tutti i fronti, l’Iran emerge vittorioso dal confronto duro con il mondo sunnita, in gran parte grazie agli errori di calcolo americani. Con la bomba nucleare da una parte e il controllo di due stretti, Teheran sarebbe di fatto in posizione di egemonia. L’arsenale dei paesi del CCG sarà davvero inutile perché Washington ne bloccherà l’uso politico e tecnologico.
L’Arabia Saudita, sulla soglia di una eredità difficile, riuscirà a sopravvivere? Niente è meno certo. Salman, il principe ereditario e attuale ministro della difesa, è affetto dal morbo di Alzheimer ; il principe Muqrin, numero due nell’ordine di successione, rispettato e saggio, però, è di provenienza yemenita e non da un clan reale Saoud . La prossima generazione è, a sua volta, pieno di appetiti frustrati; a cinquantacinque o sessantacinque anni, di non detenere ancora le redini del regno …
L’osservatore attento avrà notato un segno del panico che afferra il regime e non sbaglia: la trasformazione della Guardia Nazionale (la SANG) in una armata (maggio 2013) sotto il controllo di un ministro (il figlio del re, il principe Mitaeb). La Guardia Pretoriana sostituisce perciò le legioni ritenute poco inaffidabili. Il Principe Mitaeb ha avuto cura di fornire di armi moderne la SANG (caccia F-15, elicotteri da trasporto e da combattimento, veicoli blindati e di difesa terra-aria) provenienti da fornitori diversificati(in particolare la Francia) e soprattutto differenti dalle forze armate tradizionali (un evento comune nel Golfo per evitare gli embargo e preservare il segreto).
Lezioni per la Francia |

Di fronte a questo, qual è la politica della Francia? Che de “il cane morto sul pelo dell’acqua.” L’allineamento francese sulle posizioni americane, evidente dalla reintegrazione francese nel comando integrato della NATO (marzo 2009), è costata a Parigi la perdita di qualsiasi margine di manovra per giocare un ruolo, per di più tagliato su misura dgrazie alla sua tradizione diplomatica e ai suoi alleati regionali. Apprendista stregone in Libia (nel febbraio 2011), cieco in Siria (al punto di formare e armare gli islamisti “moderati” e di essere sul punto di inviare i Rafale in agosto 2013 ripetendo così l’errore libico) girando la schiena all’Iran (chiedendo sempre maggiori sanzioni), è stata presa alla sprovvista dalla giravolta estiva americana. Questo raggiro di Parigi da parte di Washington si limiterebbe al ridicolo se non comportasse conseguenze tragiche sul terreno attuale e in futuro
Parigi non ha più carte tra le mani: le strade di Mosca, Teheran e Damasco sono sbarrate e non sono nemmeno sicuro che quelle del palazzo saudita di Al Yamamah e della Casa Bianca siano ancora aperte. Abbandonata la propria tradizione diplomatica, sorda alle realtà sul terreno (riarmo di ribelli incontrollabili, il massacro dei cristiani, le conseguenze di terrorismo sul proprio territorio), si è fuorviata in questo complicato Oriente che pure conosceva così bene.

Per svolgere un ruolo coerente con la propria tradizione e con le aspettative dei suoi alleati regionali, la Francia non avrà altra scelta che ritrovare la strada di Mosca, Teheran e Damasco. In tal modo, la Francia apporterà un canale di discussione apprezzato dalle parti in conflitto nella regione e, c’è da scommettere, dalla futura amministrazione americana. Partecipare a tutto e non essere escluso da nulla: questo è infatti il ​​segreto della diplomazia
Aymeric Chauprade
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